Vitol
Profil
L'actionnariat de Vitol est constitué par ses 360 employés-actionnaires, dont aucun ne détient plus de 5% d'actions. Même son directeur, Ian Taylor, ne dépasse pas ce taux. Le Groupe Vitol est l'une des sociétés mondiales majeures dans le courtage de pétrole brut (après Glencore et Gunvor). Elle est active également dans le négoce d'autres matières premières comme les métaux, le charbon, le gaz naturel et biocarburant, l'éthanol et les produits chimiques.
Fondée en 1966 par Henk Victor et Jacques Detiger à Rotterdam, l'entreprise se concentre d'abord sur le pétrole brut et autres produits pétroliers, avant d'élargir ses horizons. Ian Taylor, le président du conseil d'administration, quitte Shell pour rejoindre Vitol en 1985. Au total, le Groupe Vitol en 2013 regroupe 3'038 employés dans 29 filiales dans le monde. Elle détient 50% de l'entreprise VTTI (dont l'autre part appartient au groupe MISC) et possède la société énergétique Arawak. En 2011, le Groupe Vitol transporte 135 mio. de tonnes de pétrole brut, ce qui représente 2.7 mio. de barils par jour. L'entreprise totalise alors 5'460 transports maritimes (environ 200 bâteaux en circulation en tout temps). Son chiffre d'affaire s'élève cette année-là à 297 milliards USD.
Sources:
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LE TEMPS (2012)
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VITOL (2013)
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BUSINESSNEWS (2011)
Domaine d'activité
Contraintes normatives volontaires
Dans la rubrique "responsabilité" de son site internet, Vitol s'engage à "respecter ses clients, ses fournisseurs et partenaires, ainsi que les communautés où elle opère". Elle admet de hauts standards de "bonne gouvernance", notamment dans sa gestion des risques financiers et de l'environnement. Vitol promet l'égalité des chances, assure la sécurité de ses employés dans leur travail. Enfin, vis-à-vis de l'environnement, elle s'engage à respecter des standards stricts de sécurité et à "minimiser, quand c'est possible, l'impact de ses opérations sur l'environnement".
Pour terminer, la Fondation Vitol se donne pour objectif de soutenir les projets de développement à long terme ainsi que les causes humanitaires. Fondée en 2006 pour améliorer la vie d'enfants en état de précarité dans le monde, elle réunit, en 2011, 257 projets en collaboration avec 170 organisations différentes dans 61 pays.
Sources:
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VITOL (2013a)
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VITOL (2013)
Affaires juridiques en cours
Vitol se trouve impliquée en 2013 dans le procès français de l'affaire dite "pétrole contre nourriture".
Synthèse
En tant que 3ème société mondiale dans le négoce de pétrole brut, Vitol peut tenir une position d'exemple, à la fois pour les plus petites structures, mais également pour les géants comme Glencore. Si elle peut encore améliorer son engagement pour l'environnement, Vitol peut se vanter de ne pas être touchées par de nombreuses affaires. D'autant que la principale affaire qui la concerne, celle du "pétrole contre nourriture", a impliqué de nombreuses autres sociétés coupables de même délit.
Index des sources
VITOL (2013), « About VItol », site du Groupe Vitol. URL : http://www.vitol.com">http://www.vitol.com (dernière consultation le 07.02.2013)
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Responsability
http://www.vitol.com/responsibility.html">http://www.vitol.com/responsibility.html
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Description
http://www.vitol.com/about-vitol.html">http://www.vitol.com/about-vitol.html
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Fondation
http://www.vitol.com/vitol-foundation.html">http://www.vitol.com/vitol-foundation.html
VITOL (2013a), « Responsability », site du Groupe Vitol. URL : http://www.vitol.com/responsibility.html">http://www.vitol.com/responsibility.html (dernière consultation le 07.02.13)
LE TEMPS (2012), « Vitol, le trader qui encaissait 300 milliards », article de Pierre-Alexandre Sallier, le 22.02.2012. URL : http://www.letemps.ch/Page/Uuid/e0778c6e-5cc2-11e1-ae07-78b9b20792c1/Vitol_le_trader_qui_encaissait_300milliards#.UQVKxvKoqSo
BUSINESSNEWS (2011), “Meet The Mysterious Trading Firms Who Control The Price Of Commodities”, 31.10.2011. URL:
http://businessnews.com.ng/2011/10/31/meet-the-mysterious-trading-firms-who-control-the-price-of-commodities/">http://businessnews.com.ng/2011/10/31/meet-the-mysterious-trading-firms-who-control-the-price-of-commodities/ (07.02.13)
LE TEMPS (2013), « Pétrole irakien: Vitol sur le banc des accusés à Paris », article de Pierre-Alexandre Sallier, le 22.01.2013. URL : http://www.letemps.ch/Page/Uuid/779b2684-6404-11e2-abfa-c982920159cc/P%C3%A9trole_irakien_Vitol_sur_le_banc_des_accus%C3%A9s_%C3%A0_Paris">http://www.letemps.ch/Page/Uuid/779b2684-6404-11e2-abfa-c982920159cc/P%C3%A9trole_irakien_Vitol_sur_le_banc_des_accus%C3%A9s_%C3%A0_Paris
LE TEMPS (2013a), « Hormis Vitol, le procès sur le brut irakien épargnera le négoce suisse », article de Pierre-Alexandre Sallier, le 24.01.13. URL : http://www.letemps.ch/Page/Uuid/8c369a1e-659a-11e2-b01d-06a4122266b3/Hormis_Vitol_le_proc%C3%A8s_sur_le_brut_irakien_%C3%A9pargnera_le_n%C3%A9goce_suisse">http://www.letemps.ch/Page/Uuid/8c369a1e-659a-11e2-b01d-06a4122266b3/Hormis_Vitol_le_proc%C3%A8s_sur_le_brut_irakien_%C3%A9pargnera_le_n%C3%A9goce_suisse
VOLCKER Paul (dir.) (2005), Report on Programme Manipulation, Indepedent Inquiry Committee into the United Nations Oil-For-Food Programme, 27.10.2005. URL: http://www.iic-offp.org/documents/IIC%20Final%20Report%2027Oct2005.pdf">http://www.iic-offp.org/documents/IIC%20Final%20Report%2027Oct2005.pdf
CONFEDERATION SUISSE (2008), « Pétrole contre nourriture: condamnations et confiscation d’avoirs en Suisse », Berne, 18.03.2008. URL : http://www.news.admin.ch/message/index.html?lang=fr&msg-id=17875">http://www.news.admin.ch/message/index.html?lang=fr&msg-id=17875
SWISSINFO (2007), «Pétrole contre nourriture»: mea culpa d'une firme suisse », site swissinfo.ch, le 21.11.2007. URL : http://www.swissinfo.ch/fre/Petrole_contre_nourriture:_mea_culpa_dune_firme_suisse.html?cid=6267646">http://www.swissinfo.ch/fre/Petrole_contre_nourriture:_mea_culpa_dune_firme_suisse.html?cid=6267646
LE TEMPS (2013b), « Ce diplomate proche de Tarek Aziz qui vaut à Vitol un procès à Paris », article de
Pierre-Alexandre Sallier, 29.01.13. URL : http://www.letemps.ch/Facet/print/Uuid/0fe71f36-6984-11e2-af96-b6ac40bf8f35/Ce_diplomate_proche_de_Tarek_Aziz_qui_vaut_%C3%A0_Vitol_un_proc%C3%A8s_%C3%A0_Paris">http://www.letemps.ch/Facet/print/Uuid/0fe71f36-6984-11e2-af96-b6ac40bf8f35/Ce_diplomate_proche_de_Tarek_Aziz_qui_vaut_%C3%A0_Vitol_un_proc%C3%A8s_%C3%A0_Paris
LE TEMPS (2013c), «Ce pétrole était obtenu sous l’auspice des Nations Unies», article de Pierre-Alexandre Sallier, le 24.01.2013. URL : http://www.letemps.ch/Page/Uuid/8c5cc64e-659a-11e2-b01d-06a4122266b3/Ce_p%C3%A9trole_%C3%A9tait_obtenu_sous_lauspice_des_Nations_Unies">http://www.letemps.ch/Page/Uuid/8c5cc64e-659a-11e2-b01d-06a4122266b3/Ce_p%C3%A9trole_%C3%A9tait_obtenu_sous_lauspice_des_Nations_Unies
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2000
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Lieu
Description
Suite à l'invasion en 1991 du Koweït par l'Irak, dirigée alors par Saddam Hussein, l'ONU impose un embargo sur l'Irak. Dès 1996 et jusqu'en 2003, l'organisation met en place un programme intitulé "pétrole contre nourriture". L'objectif consiste à ouvrir l'accès pour le peuple irakien à l'aide humanitaire et à la nourriture en échange de l'accès au pétrole irakien pour les sociétés étrangères. L'Irak pouvait à nouveau vendre son pétrole hors de ses frontières, à condition que le prix soit considéré comme acceptable par rapport au prix du marché par l'ONU et que l'argent gagné soit déposé sur un compte géré par l'ONU et destiné uniquement à des fins humanitaires. L'Irak pouvait choisir ses propres acheteurs. Elle privilégia donc les personnalités ou pays pro-irakiens, si possible bénéficiant d'une forte influence dans la politique internationale, qui puissent soutenir notamment la levée de l'embargo. D'autres pays, considérés comme "inamicaux" envers l'Irak, tel les Etats-Unis ou l'Angleterre, étaient écartés du commerce du pétrole.
A partir de l'an 2000, l'Etat irakien commence à exiger le paiement de "surcharges" pour chaque baril vendu. L'ONU prévient les entreprises et privés que le paiement de telles surcharges était illégal. Pourtant, cela n'empêche quatre sociétés majeures, entre décembre 2000 et juillet 2001, de continuer d'acheter du pétrole, souvent via des firmes intermédiaires, tout en payant les surcharges exigées. Ces entreprises sont Bayoil, Taurus, Glencore et le Groupe Vitol. L'Etat irakien commence également à partir de 1999 à exiger des "pots-de-vin" pour l'octroi d'un contrat portant sur les biens humanitaires. Au total, 139 entreprises du programme "pétrole contre nourriture" ont payé des "surcharges" pour le pétrole et 2'253 ont émis des pots-de-vin pour des contrats de vente de bien humanitaires. Ces chiffres proviennent d'un rapport publié en 2005 par la "commission Volcker" (du nom de son directeur Paul Volcker, ancien directeur de la Réserve Fédérale Américaine). Le nom de 37 sociétés suisses ou basées en Suisse figurent dans les pages de ce dossier.
Vitol apparaît donc parmi les principaux accusés. Vitol a notamment utilisé une société Malaysienne intermédiaire (Mastek) pour acheter du pétrole à l'entreprise étatique irakienne SOMO (State Oil Marketing Organization). Vitol a même payé la plus importante de toutes les "surcharges" sur un contrat individuel durant la phase de commerce illicite. "SOMO assessed over $10 million in surcharges on Mastek Phase IX contract, the single largest assessment on any given contract during the illicit scheme" [VOLCKER (2005), p. 157]. Vitol a aussi profité du lien étroit entre le diplomate français M. Boidevaix et le gouvernement irakien pour obtenir du pétrole en accordant des primes à M. Boidevaix pour chaque baril obtenu. Durant la phase IX de la "crise d'exportation", Vitol fut, selon le rapport Volcker, le plus important acheteur de pétrole brut irakien, avec 33 millions de barils obtenus par l'intermédiare de Mastek durant cette phase (p. 162).
En novembre 2007, Vitol plaide coupable devant les tribunaux américains à Mahanattan, reconnaissant sont implication dans l'affaire "pétrole contre nourriture". L'arrangement avec la justice américaine requiert que la société suisse paie 13 mio. USD au fonds de développement de l'ONU destiné au peuple irakien ainsi que 4.5 mio. USD pour les frais de justice. Vitol reconnaît avoir versé 13 mio. USD de pots-de-vin au régime de Saddam Hussein entre 2001 et 2002 pour obtenir des contrats pétroliers. Elle admet aussi ses faux témoignages lors des interrogatoires menés par l'ONU.
Le Ministère Public de la Confédération helvétique (MPC) ouvre également une enquête sur une trentaine d'entreprises suisses impliquées dans l'affaire, parmi lesquelles Vitol. En 2008, le MPC annonce avoir confisqué 17 mio. CHF au total.
Au début de l'année 2013, Vitol se retrouve accusée pour les mêmes faits lors de la version française du procès "pétrole contre nourriture". Elle est la seule entitié morale, avec Total, à figurer parmi les accusés. Les autres sont majoritairement des hauts fonctionnaires français, dont Broidevaix - qui avait permis à Vitol de commettre certaines de ses actions illégales. La solitude de Vitol sur le banc des accusés s'explique, selon Le Temps, par l'importance de la société dans l'affaire. En effet, selon la Déclaration de Berne, sur les 230 mio. USD payés en surtaxe entre 1995 et 2003, 15% étaient liés au brut obtenu par Vitol (+ 14% par Taurus, 13% par Glencore et 0.7% par Trafigura). Elle s'explique également par le fait que l'un des accusés français, Broidevaix comparait pour "trafic d'influence et corruption" et que ses activités sont indissociables de celles de Vitol.
Au moment de l'apparition des accusations en 2004, puis surtout lors de l'enquête menée par les Nations Unies, Vitol nie les allégations. Elle reconnaît finalement les faits en 2007 lors du procès face à la justice américaine. En 2013, elle refuse tout commentaire avant la fin du procès français.
L'avocat de Vitol, Olivier Metzner, s'oppose aux poursuites françaises contre la société avec deux arguments: (1) tout d'abord, Vitol a déjà été jugée aux Etats-Unis et l'accusation ne peut, selon lui, être reconduite. (2) Ensuite, puisque les ventes s'effectuaient sous l'auspice des Nations Unies, rien n'interdisait à Vitol d'acheter du pétrole.
Sources:
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LE TEMPS (2013)
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LE TEMPS (2013a)
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VOLCKER Paul (dir.) (2005)
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CONFEDERATION SUISSE (2008)
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SWISSINFO (2007)
Normes franchies
Infraction éthique | Infraction juridique | Cadre normatif suisse | Type de cas | Victimes humaines | Victimes non humaines | Degré de fondamentalité des intérêts frustrés | Durée |
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oui | oui | oui | abus | 3/3 | 0/3 | 0 | 0 |
Source de la norme juridique déterminant l'infraction
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Synthèse
La ligne de défense soutenue par Vitol lors de son procès en 2013 correspond à celle choisie par de nombreux accusés. Tout d'abord, il semble difficile de l'accuser pour des achats qui s'effectuaient sous le contrôle de l'ONU. Plusieurs accusés, à ce propos, relèvent qu'ils ne pouvaient savoir qu'ils commettaient des actes illégaux puisque non seulement l'ONU chapeautait les transactions, mais qu'en outre les prix de vente, même surtaxés, ne dépassaient pas les prix du marché. Plus significatif encore, Glencore par exemple défend que les accusations de corruption répondent à l'idée majoritaire au sein de l'ONU que toute personne qui bénéficiait du brut irakien apportait son soutien au régime et était ainsi récompensé par l'octroi d'un contrat. Mais si l'établissement d'un contrat découlait du paiement d'une surtaxe, et non du soutien politique, alors les accusations de corruption tombent. Or, il est très difficile de départager les échanges "corrompus" par le soutien politique de ceux de commerce simple, où la surtaxe ne permettait pas de savoir qu'elle reviendrait à l'Irak et non aux Nations Unies. Le verdict du tribunal parisien apportera sûrement des éclaircissements sur les actes de Vitol.
Sources:
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LE TEMPS (2013b)
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LE TEMPS (2013c)